Concerto pour clarinette

2012

Clarinette solo et orchestre

23 mn

• Première audition : 19/11/2012, Théâtre du Châtelet, Paris – Paul Meyer (clarinette), Orchestre de chambre de Paris, Joseph Swensen (direction).

• Création belge : 21/03/2013, Philharmonie, Liège – Paul Meyer (clarinette), Orchestre philharmonique de Liège, Christian Arming (direction).  

• Commande de l’Orchestre de chambre de Paris, de l’Orchestre national de Lyon et de la société Buffet Crampon.

• Éditeur : Gérard Billaudot.

Je souhaitais faire, après l’écriture d’une série d’œuvres plus proches de la symphonie concertante dédiées à l’orgue, la trompette ou le piano, un véritable concerto dans lequel le soliste conduirait vraiment le discours.

L’œuvre se divise en quatre parties s’enchaînant sans solution de continuité. Un motif de quatre notes disjointes énoncé dès le début sert de matériau mélodique et harmonique et même d’«accord-timbre» pour toute la pièce. On le voit se dessiner dès le début dans un enchevêtrement de timbres entre le soliste et l’orchestre, sur des vagues mouvantes d’accords répétés. La clarinette tente à plusieurs reprises de s’échapper de ce magma sonore (à l’intérieur duquel elle se forme) par des lignes plus virtuoses. Mais cette partie reste inexorablement dans le rêve et dans un temps souvent suspendu. La fusion entre le soliste et l’orchestre reste l’élément le plus marquant dans l’écriture de ce premier épisode.

Cela n’est plus le cas pour la seconde partie, qui voit se transformer les motifs de la première partie en un caractère plus motorique et obstiné. Au fur et à mesure de cette progression ascendante sur le plan de la direction harmonique, les variations sur le motif initial alternent entre le soliste et l’orchestre, et la rigueur obstinée de la basse – évoquant une sorte de mécanique imperturbable – s’oppose à la mouvance de l’écriture instrumentale et timbrique qui laisse apparaître des lignes en quarts de ton à la clarinette ou des phases de glissandos enchevêtrés à l’orchestre.

Un événement cadentiel marquant le premier sommet d’intensité de la pièce, durant lequel des effets d’échos multiples irradient tout l’orchestre en réponse aux traits de clarinette, aboutit progressivement à une partie plus calme, la troisième, où, cette fois, les accords répétés du début semblent accompagner une mélodie aux contours baroques, conjointe et descendante, second élément structurel important de la pièce. Reprise à plusieurs reprises, mais à chaque fois variée, elle se charge, de façon parfois inattendue, d’intensité expressive tout en gardant cette ligne de basse chromatique descendante qui la caractérise et qui servira de base harmonique à la passacaille finale.

En effet, la dernière partie s’ouvre sur un ground présenté sous la forme d’une mélodie de timbre sèche et mécanique, presque glaçante. De nombreuses variations autour de ce motif s’enchaînent avec parfois un caractère proche du jazz ; mais elles laissent apparaître à de courts instants une rythmique ternaire qui semble vouloir imposer au fil de ses apparitions des élans plus lyriques. Tout cela dans une sorte de duel de plus en plus violent qui aboutira à un «choral» final où la clarté enfin révélée du motif mélodique linéaire de la seconde partie sera entrecoupé par les soubresauts et la noirceur du motif harmonique initial et ses répétitions d’accords obsédants.

Thierry Escaich